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journaliste, homme de presse écrite, de radio et de télévision.

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L’ISF ou comment MACRON peut retirer le caillou dans sa chaussure

Qualifié par les uns d’impôt imbécile qu’il fallait enlever dare-dare du paysage fiscal, vécu par les autres comme un symbole de justice fiscale qu’il faut rétablir au plus vite, l’ISF ne mérite ni cet excès d’indignité, ni cet excès d’honneur. Dans toute la panoplie des impôts et taxes, l’Impôt Sur la Fortune, l’ISF, occupe une place bien originale.

En termes économiques, il n’a jamais représenté grand’chose (4,23milliards en 2017, sa dernière année d’existence) ; grevé d’exemptions en tout genre (plafonnement, œuvres d’art…) ce fut une sorte de panier percé ; suffisamment dissuasif cependant pour conduire un certain nombre (combien ? 15 à 20 000, dit-on) d’assujettis à s’exiler en Belgique à quelques centaines de mètres parfois de la frontière française. Ajoutons avec Thomas Piketty que l’ISF n’a jamais vraiment fait l’objet d’une attention très aigüe des services fiscaux. Selon lui du reste, avec un contrôle fiscal renforcé, cet ISF aurait pu rapporter jusqu’à 10 milliards par an. Par contre, à en croire ses détracteurs, ce même impôt aurait constitué un frein aux investissements étrangers en France -ce qui est loin d’être démontré-. Enfin, sans conteste, l’ISF a un effet redistributif faible comparé au seul impôt sur le revenu qui rapporte à lui seul plus de 70 milliards par an.

Macron a décidé de le supprimer dès son arrivée à l’Elysée. L’argument qu’il avançait (et auquel il se raccroche toujours) était de doper les investissements dans l’économie et de faire revenir les « exilés fiscaux ». Le retour de ces derniers semble se faire attendre et il est bien difficile de faire le tri dans le redémarrage des investissements, entre ceux qui sont la conséquence de cette fin de l’ISF et ceux qui auraient eu lieu de toute façon au vu de l’amélioration de la conjoncture en 2017.

Arcbouté à son argumentaire

Aujourd’hui, dans le contexte « gilets jaunes », arcbouté à son argumentaire, le Président exclut de revenir sur la suppression de l’ISF, comme sur l’introduction de la flat tax (taxe forfaitaire sur les revenus du capital qui a remplacé l’imposition de ces revenus à l’Impôt sur le Revenu).

Mais l’ISF est devenu un symbole depuis sa suppression -à l’instar de la suppression de son ancêtre l’Impôt sur les grandes fortunes par Chirac en 1986-. On peut même avancer qu’il est pour les « gilets-jaunes » et sans doute au-delà, la marque de fabrique du costume de « Président des riches » que, bon gré mal gré, Emmanuel Macron s’est vu contraint d’endosser. A tel point que même au sein de ses proches, voire de ses ministres, on s’avance doucement sur le thème : » il faudra évaluer l’efficacité de la suppression de l’ISF… ».

En supprimant l’ISF -et en le remplaçant par l’IFI, Impôt sur la Fortune Immobilière- l’idée, on l’a vu, consistait à "libérer" des capitaux qui pourraient s’investir dans l’économie. Il est à craindre que ces capitaux libérés se soient en grande part plutôt investis dans des consommations de luxe, des modes de vie ostentatoires… Mais pour en avoir le cœur net et pour prendre au mot l’argumentaire macronien, il suffirait, dans un double mouvement, de rétablir l’ISF et de permettre aux redevables d’en déduire 100% des sommes effectivement investies dans l’économie (les PME, les start-ups…). Ainsi l’ISF nouvelle manière (baptisons le « ISF-invest ») renaîtrait en tant que super-symbole de la nouvelle macronie, mais ne ferait plus « peur » à qui que ce soit, puisque ceux qui seraient taxables mais qui décideraient, preuves à l’appui, d’investir le montant dû au fisc en seraient tout bonnement dispensés.

Bref, le rétablissement d’un tel ISF-invest, créerait un effet de « souffle » susceptible d’éteindre quelques braises « jaunes » persistantes, constituerait un geste d’importance vis-à-vis de l’opinion et « en même temps » permettrait au Président de la République d’ôter un sacré caillou bien lové au fond de sa chaussure sans pour autant se renier.

 

Sylvain GOUZ

(2/01/2019)

 

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Sylvain GOUZ a créé et anime MEDIΔGOUZ, la structure qui abrite ses activités de journalisme et de conseil media...

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