journaliste, homme de presse écrite, de radio et de télévision.
MEDIΔGOUZ
BAYROU : la vérité est ailleurs1 !
Le moment de vérité, c'était la devise affichée en surplomb de François BAYROU qui s’exprimait ce mardi. Beaucoup de critiques, peu d’applaudissements, il a de quoi être déçu. Lui qui voulait se mettre dans la lignée de Pierre MENDÈS-FRANCE –comment ose-t-il ?- ou, à tout le moins de CHURCHILL (« du sang et des larmes »), aura tout juste réussi à recevoir les félicitations de son Président de la République, quelques louanges du patronat et quelques soupirs de soulagement (muets) des grandes fortunes et des plus grosses entreprises.
Il faut dire qu’il y a mis du sien le Premier ministre. Pas tellement pour se montrer disruptif sur les mesures proposées que pour leur trouver un bel emballage cadeau. De la falaise qui s’écroulera sur notre dette, au repoussoir de la crise grecque, les épouvantails ne manquaient pas. L’appel au patriotisme y trouve son compte d’une mise en scène dramatique. Et il convient de reconnaître que le discours était bien écrit et pas si mal prononcé.
Au-delà, que dire du dispositif budgétaire proposé ? pas grand-chose sinon qu’il est dans la continuité du macronisme habituel (politique de l'offre, faveur aux plus riches, refus de l'équité fiscale).
Pas grand-chose sinon que, en recherche des responsabilités passées, BAYROU fait l’impasse sur les mesures mises en vigueur depuis 2017 qui sont pour une large part responsables du dérapage des finances publiques ; 4 milliards par an pour l’institution du prélèvement forfaire sur les revenus du capital et encore 4 milliards pas an pour le remplacement de l’ISF (impôt sur la fortune) par l’IFI (impôt sur la fortune « immobilière »). Sur les huit ans qui nous séparent de l’arrivée de MACRON à l’Élysée, cela a constitué une ardoise de 64 milliards. Sans que personne ne se risque à en chiffrer les éventuelles retombées positives…
Pas grand-chose donc sinon que -cela a été dit et redit dans les commentaires- ce seront les plus démunis et des classes moyennes inférieures qui feront les frais de « l’année blanche » envisagée : blocage des prestations en 2026 à leur niveau 2025 y compris les prestations pour handicapés, l’allocation logement, le RSA, les pensions de retraite, les indemnités chômage… et que gommer la célébration de la victoire sur l’Allemagne nazie n’est pas bienvenu.
QUELQUES PETITS OUBLIS…
Tous les Français seront mis à contribution a affirmé le Premier ministre. Mais, au passage, il en oublie quelques-uns : les actionnaires, car nous n’avons pas entendu que les dividendes feraient l’objet d’une année blanche. Oubliés également les dirigeants des très grandes entreprises dont les rémunérations ne seront pas davantage bloquées.
Quitte à s’inspirer des grands réformateurs qui ont sorti leur pays d’une crise, le Premier ministre eut pu regarder vers les États-unis. Pas les États-Unis de TRUMP, mais ceux de ROOSEVELT qui en quatre ans, lors du New Deal, de 1932 à 1936, fit passer le taux d’imposition des plus hauts revenus (taux de la plus haute tranche) de 25 à 79% et l’augmenta à 94% en 1944 (en pleine guerre). Ici, les revenus supérieurs à 180 294 € annuels sont imposés à …45% (hors niches fiscales). MACRON n’est pas ROOSEVELT, BAYROU non plus. On s’en doutait.
Les ultra-riches français d’aujourd’hui peuvent donc dormir tranquille. Mises à part quelques allusions à la lutte contre la fraude et l’optimisation fiscale et l’annonce d’une contribution spéciale -qui reste à discuter- la fiscalité est absente de la partition du Premier ministre.
Au-delà, ce qui saute aux yeux et aux oreilles , c’est que dans ce discours aux accents délibérément mélodramatiques, pas une allusion n'est faite, pas même esquissée, aux près de 10 millions de nos concitoyens (9,7 millions précisément) qui vivent -si l’on peut écrire- avec moins de 1 288 € par mois. Un record de pauvreté enregistré par l’INSEE pour l ‘année 2023 : 15,4% de la population.
Autre absent de marque, le climat ; pas un mot sur la transition écologique -sinon pour pointer les fraudes au dispositif « MaPrimeRénov». Tout juste les entreprises pourront-elles bénéficier de rabais sur leurs factures d’électricité, alors que la droite et l’ultra droite viennent juste de faire adopter un moratoire sur les énergies renouvelables. Un domaine où la France accumule les retards coupables.
Le moment de vérité, tel était le slogan sous lequel s’abritait BAYROU. Il fallait comprendre une indulgence pour les ultra-riches, un aveuglément face à la pauvreté, une cécité sur la crise climatique et environnementale.
Décidément, la vérité est ailleurs.
1 "La vérité est ailleurs" (X-FILES), fameuse série télévisée du milieu des années 1990
Sylvain GOUZ
16 juillet 1025
MEDIΔGOUZ
Sylvain GOUZ a créé et anime MEDIΔGOUZ, la structure qui abrite ses activités de journalisme et de conseil media...