journaliste, homme de presse écrite, de radio et de télévision.
MEDIΔGOUZ
Protection sociale : qui doit payer ?
Il aura donc fallu quelques phrases récentes d’Emmanuel MACRON à propos du financement de la protection sociale pour que le serpent de mer de la « TVA sociale » remonte des profondeurs et que la sphère médiatique s’en empare une nouvelle fois et s’emballe.
De quoi s’agit-il ? En résumé, aujourd’hui, la protection sociale (accidents du
travail, chômage, maladie, famille, logement, retraites…) est financée pour
moitié (53%) par les cotisations salariales et patronales. L’Etat rajoute déjà
sa contribution en y affectant une petite part de ses recettes de TVA, tandis
que la CSG couvre les cotisations salariées pour le chômage et la maladie.
Le raisonnement de MACRON -partagé par le patronat- consiste à dire que le
manque de compétitivité des produits français (déficit structurel de la balance
commerciale) résulte du poids des cotisations sociales qui, de surcroît, pèsent
sur la feuille de paie des salariés. Exit ces cotisations sociales, l’entreprise
se portera mieux et le pouvoir d’achat du salarié aussi !!
Et que substituer à ces douloureuses cotisations sociales ? réponse, une hausse
d’un point ou deux de TVA. L’avantage -théorique- d’une telle bascule, c’est que
la TVA est -ou serait- indolore. Il est bien vrai que les consommateurs
aujourd’hui s’en acquittent sans même s’en rendre compte. Ce qui, au passage, ne
signifie pas qu’ils ne réaliseraient pas une hausse de cette taxe se répercutant
sur les prix.
Au total avec cette manœuvre, les consommateurs se substitueraient aux
entreprises et aux salariés. Le gain de pouvoir d’achat du salarié serait
compensé -et sans doute au-delà- par la perte de pouvoir d’achat du
consommateur.
Avec comme conséquence certes un élargissement de « l’assiette » de l’impôt (il
y a bien davantage de consommateurs que de salariés) et des gains pour les
comptes des entreprises. Et également un accroissement des inégalités fiscales :
il va de soi que plus on grimpe dans l’échelle des revenus, plus augmente la
capacité d’épargner et plus faible est, en conséquence, la part de ces revenus
consacrée à la consommation et donc à acquitter la TVA.
BISMARCK ou BEVERIDGE ?
Mais il faut revenir au fond de l’affaire : comment financer la protection
sociale ? Il est bienséant, à tout propos, de se comparer aux autres pays
européens. En l’occurrence, deux schémas prévalent : le « bismarckien » qui
donne la priorité aux cotisations des salariés et des entreprises et le «
béveridgien » qui privilégie le financement par l’impôt. De ce côté-ci le modèle
danois voit dans l’impôt le financement principal (à hauteur de 80%) des
prestations sociales.
Côté bismarckien voici le modèle allemand. Et là, surprise ! nos voisins d’Outre-Rhin tablent plus fortement que nous sur les cotisations sociales qui entrent pour 62% dans le financement des prestations (contre, rappelons-le, 53% en France) pour une protection sociale quasi équivalente.
L’écart de compétitivité entre les productions française et allemande ne tient
donc pas vraiment aux différences de financement des prestations sociales comme
le sous-entend MACRON. Sans doute faut-il incriminer davantage le différentiel
de « qualité » entre les produits des deux pays.
Philosophiquement, c’est là que l’évocation de BISMARCK d’un côté et de
BEVERIDGE de l’autre est pertinente, la question se pose de définir le mode de
financement le plus JUSTE. De ce point de vue le financement par l’impôt
l’emporte. Il apparaît carrément plus éthique que l’État, c’est-à-dire
l’ensemble de la collectivité, mette la main à la poche. Mais à une condition
essentielle, à savoir que les recettes de l’État et, pour faire court, la
fiscalité, soit elle aussi JUSTE.
En France on en
reste assez éloigné.
Mais cela est une autre histoire …
Sylvain GOUZ
(20 mai 2025)
MEDIΔGOUZ
Sylvain GOUZ a créé et anime MEDIΔGOUZ, la structure qui abrite ses activités de journalisme et de conseil media...