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journaliste, homme de presse écrite, de radio et de télévision.

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De la PUB dans les JT de TF1 : un douteux mélange des genres

Ainsi donc, entre un reportage sur Mossoul et un « retour en France… », l’excellent Gilles BOULEAU, présentateur du JT de TF1, devra bientôt glisser une formule du genre « je vous retrouve dans un instant après une page en couleur… » ou « juste une pause publicitaire et retour à l’information… ».

Ainsi en a décidé le Conseil supérieur de l’audiovisuel qui vient d’autoriser la chaîne privée -qui demeure en tête des  audiences- à introduire de la publicité (un écran, deux écrans ?) dans ses journaux télévisés. Ce qui pourrait lui rapporter 10 à 40 millions de recette publicitaires en plus.

La décision du CSA est subtile : en effet, depuis un décret de 1992, les coupures de publicité étaient autorisés dans les émissions d’information des chaînes privées, mais TF1 était exclu du dispositif vu sa domination du marché publicitaire. C’est à cette « exception » qu’il vient donc d’être mis un terme, à la demande expresse de TF1.

Au sein de la chaîne, la décision n’aurait pas été prise d’utiliser cette nouvelle faculté à très court terme. Il n’empêche, l’épée de Damoclès est désormais suspendue au dessus de la vaste salle de la tour TF1 à Boulogne-Billancourt où se tiennent les conférences de rédaction. Et le risque existe désormais que s’imposent dans la discussion du contenu du journal une interrogation du genre  « les faits divers » vont-ils attirer davantage les annonceurs que « la politique » ? ou encore que s’impose le constat qu’ il est délicat de passer ce soir un reportage décapant sur les produits de la marque XXX car il y a une pub pour XXX programmée à 20h17  …

Une mauvaise action contre l’information

Bref, jusqu’ici, depuis la privatisation en 1987, l’information à TF1 avait réussi à passer entre les gouttes. Certes l’audience des JT était une préoccupation -davantage pour certains présentateurs et rédacteurs en chef que pour d’autres peut-être- mais la frontière entre la rédaction et la régie publicitaire demeurait parfaitement imperméable. En dynamitant cette cloison étanche, le CSA commet une mauvaise action. En premier lieu à l’encontre des journalistes de cette belle rédaction. Mais tout autant à l’encontre des téléspectateurs qui demeurent encore en majorité enclins à s’informer via les JT de cette chaîne. Allergiques à la publicité, certains seront peut-être tentés d’aller chercher leur miel sur les chaînes publiques.

Aujourd’hui les journalistes dans leur ensemble, et plus particulièrement ceux qui travaillent à la télévision, ne bénéficient pas d’une grande considération dans l’opinion. En autorisant allègrement le mélange des genres « information-publicité » sur le premier media d’information de France, le CSA ne contribuera pas à redorer leur blason. A l’inverse.

Déjà l’irruption de la pub sur les ondes de France Inter et France info marquait un recul de l’indépendance de l’Information. Avec l’arrivée, demain, de spots publicitaires dans les JT de la UNE, un pas de plus sera franchi. Décidément, il faut l’affirmer avec force, l’information, y compris sur une chaîne privée, est un service public, un service rendu au public, qui doit donc être exempt de toute considération commerciale. Oui, il faut le réaffirmer haut et fort : L’INFORMATION N’EST PAS UNE MARCHANDISE.

 

Sylvain GOUZ

(20/07/2017)

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Sylvain GOUZ a créé et anime MEDIΔGOUZ, la structure qui abrite ses activités de journalisme et de conseil media...

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