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journaliste, homme de presse écrite, de radio et de télévision.

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Pourquoi Sarkozy s'est converti au référendum

Vous avez dit référendum. Quelle bonne idée ! Un qui doit applaudir, c'est Andréas Papandréou, passé premier ministre grec, qui avait eu l'heureuse bonne idée de demander à son peuple par référendum s'il approuvait (ou non) la trajectoire d'austérité prescrite par les « docteurs miracle » Europe et FMI.

Mal lui en avait pris. Il fut, on le sait, renvoyé sans ménagement dans les cordes. Par qui ? Par le couple infernal Merkel-Sarkozy qui jugeait tout de même un peu déplacé et même carrément inacceptable qu'on demande aux Grecs ce qu'ils en pensaient. Ainsi fut fait, exit le référendum annoncé et dans la foulée exit Papandréou.

Au lendemain de l'irruption sarkozienne dans la course à l'Elysée, il n'est pas bien original mais reste néanmoins nécessaire de pointer que le Président n'organisa pas davantage de référendum sur le bouclier fiscal ou la réforme des retraites que sur la privatisation de La Poste (pourtant réclamé par une large pétition), pas davantage sur le non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite que sur le remodelage de la carte judiciaire, sur l'institution de la franchise médicale ou la surtaxation des mutuelles…

« Chaque fois qu'il y aura blocage »

Alors quelle mouche a piqué le Président désormais candidat ? La réponse est relativement simple. Il l'a d'ailleurs indiquée, incidemment au détour d'une phrase, mercredi soir sur TF1. Le référendum s'imposera chaque fois qu'il y aura « blocage ».

Et pourquoi y aurait-il blocage ? Et bien dans l'hypothèse où se place Nicolas Sarkozy, celle de sa réélection, le « blocage » viendrait de l'impossibilité où il se trouverait alors de faire adopter par le Parlement certains projets de loi ou encore quelque réforme constitutionnelle que ce soit qui n'aurait pas l'aval d'un Sénat ayant basculé à gauche.

Sarkozy bis n'aurait plus les pleins pouvoirs : insupportable ! Qui aurait imaginé, sauf lui, que ce basculement à gauche du Sénat redonnerait des couleurs aussi flamboyantes à la pratique référendaire ?

N'est pas de Gaulle qui veut

Un bémol cependant : le court-circuit du Parlement par l'appel au peuple est possible sans problème (art. 11 de la Constitution) pour de simples lois. Mais une réforme constitutionnelle nécessite, selon le site du Conseil constitutionnel (art. 89), un vote du texte de révision par l'Assemblée nationale et le Sénat, en préalable à tout référendum. L'initiative d'organiser la consultation populaire appartient à ce moment, mais à ce moment seulement, au Président. Même si de Gaulle est passé outre cette disposition en 1962 et en 1969 et a organisé deux référendums sans en tenir compte. Mais n'est pas de Gaulle qui veut.

Alors on comprend mieux le pourquoi de la soudaine appétence référendaire du candidat Président. Pas besoin de penser référendum avec deux chambres parlementaires dans sa poche, ce qui était peu ou prou le cas jusqu'à l'automne dernier. De fait, les deux chambres ont voté comme un seul homme le Traité de Lisbonne qui balayait d'un revers de main le « non » majoritaire au traité sur la Constitution européenne de 2005, puis tout aussi facilement les réformes constitutionnelles voulues par le Président.

Referendum populiste et boomerang

Mais dès lors que le Sénat a tourné casaque, cela introduit un grain de sable dans la mécanique du Président tout puissant. Et voilà sans doute comment germa l'idée référendaire dans l'esprit d'on ne sait quel conseiller particulièrement sagace, idée qui eu l'heur de plaire au Président.

La démocratie directe est séduisante dans son principe mais souvent dévoyée dans son application. C'est l'arme par excellence de tous les populismes. Les Suisses en savent quelque chose. Ce peut être aussi une arme boomerang qui se retourne contre celui qui pose la question, quelle que soit la question.

Mais apparemment dans le discours du tout nouveau candidat, ceci ou cela n'est guère pris en compte. Sous prétexte de donner la parole aux Français contre « les élites » (au fait qui sont-elles ? ), il s'agit avant tout pour celui qui se rêve déjà en « Président-pour-cinq-ans-de-plus » de se donner les moyens d'annihiler par avance toute forme de frein à son hypothétique futur pouvoir.

Quand il vous dit que certains rêves mènent aux cauchemars…

 

Sylvain Gouz

(17/02/2012)

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Sylvain GOUZ a créé et anime MEDIΔGOUZ, la structure qui abrite ses activités de journalisme et de conseil media...

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