MediΔgouz.fr est le site éditorial de Sylvain GOUZ,

journaliste, homme de presse écrite, de radio et de télévision.

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Face au chômage, les politiques sont à côté de la plaque.

3 mesures pour tout changer

"Contre le chômage on a tout essayé", ce constat désabusé et fataliste (mais sans doute pas fatal) de François Mitterrand ne décourage décidément pas les uns ou les autres de laisser libre cours à leur imagination, souvent débridée.

 

Conditionner le RSA au bénévolat, sérieusement ? 

 

Ici, c’est un Conseil départemental du Haut Rhin (de droite) qui conditionnerait le RSA à 7 heures de bénévolat par semaine, là c’est un membre éminent de LR, Eric Ciotti, président du Conseil départemental des Alpes-Maritimes, qui entendrait supprimer ce RSA aux bénéficiaires qui auraient refusé deux offres d’emploi dites "raisonnables".

 

Venant de ce côté de l’échiquier politique on ne saurait être par trop surpris. Ces propositions ne constituent, en somme, qu’un avant-goût de ce que prépare la droite dite "classique" si elle devait revenir au pouvoir. De Sarkozy à Juppé, de Fillon à Le Maire, c’est à qui en rajoutera : TVA "sociale" étendue, protection sociale rognée, impôt sur la fortune supprimé… et pour ce qui concerne plus précisément le champ de l’emploi, l’un veut supprimer les 35 heures, l’autre abolir la notion d’horaire légal et rendre ainsi les heures supplémentaires "gratuites".

 

Bref, cette surenchère du côté d’un libéralisme économique absolu – que Pierre Gattaz, président du MEDEF se réjouisse ! – pourrait devenir la meilleure alliée de la gauche en faisant figure d’épouvantail. À une condition cependant, que celle-ci ne se laisse pas contaminer.

 

Un révisionnisme social

 

Dans mon collimateur, bien sûr, les provocations calculées d’Emmanuel Macron. L’homme n’est bien sûr pas en cause, certains de ses propos le sont. Lorsqu’il s’en prend sauvagement aux 35 heures, sans ménager son propre camp : "La gauche a cru que la France pouvait aller mieux en travaillant moins, c'était des fausses idées", ou qu’il égratigne le statut des fonctionnaires jugé "plus adéquat". Guère besoin d’en rajouter, le ministre de l’Économie le fera de lui-même.

 

Et ce "révisionnisme" social fait tâche d’huile. C’est cet autre ministre, chargé des relations avec le Parlement qui conseille aux partenaires sociaux en charge de l’Unedic de réduire la durée d’indemnisation des chômeurs.

 

Au-delà de ces bricolages individuels, jusqu’ici heureusement suivis de peu d’effets, la gauche de gouvernement – doit-on l’appeler ainsi ? – pêche surtout par son inhibition face à d’autres remèdes au sous-emploi.

 

Contrairement à la pensée dominante, et n’en déplaise au Medef, ce n’est pas le coût du travail, ni la fiscalité, ni la prétendue rigidité du Code du travail qui sont causes du chômage. Si les entreprises n’embauchent pas ou peu, c’est surtout parce qu’elles n’ont pas de débouchés, autrement dit, parce que face à leur offre – dopée à coup de CICE et de pacte de responsabilité – la demande reste atone. Après des mois de risettes sonnantes et trébuchantes au patronat, le président de la République devrait tout de même finir par s’en rendre compte…

 

Il y a des alternatives

 

Commençons par une évidence : mieux vaudrait payer les gens à travailler plutôt qu’indemniser leur chômage. Pas besoin de remonter aux Ateliers nationaux d’antan, il suffit de constater, ce n’est qu’un exemple, que la croissance verte, tant vantée de la COP 21 au discours présidentiel, ne débouche que sur très peu d’activités privées. À l’Etat donc de prendre le relais et de créer les entreprises publiques – et les milliers d’emplois qui vont avec – capables de tenir la dragée haute aux entreprises étrangères dans le domaine des éoliennes ou des capteurs solaires.

 

Supprimer les 35 heures disent-ils, de Sarkozy à Macron. C’est tout l’inverse qu’il conviendrait d’amorcer : passer la durée légale à 30 heures avec compensation financière publique pour les bas salaires. Faut-il à nouveau rappeler le bilan largement positif et unanimement reconnu du passage aux 35 heures sous Jospin-Aubry ?

 

Et puis enfin – mais ce n’est qu’une fin provisoire – plutôt que de gémir sur le chômage et de pleurer sur les sans-emplois, considérons que, contrairement là aussi à une idée reçue, le travail rémunéré n’est pas l’essence, ou en tout cas pas l’essentiel, de la vie. Toute personne devrait avoir les moyens minimum d’une vie décente qu’elle occupe ou non un emploi.

 

C’est toute l’ambition du revenu minimum d’existence, aujourd’hui rebaptisé revenu de base dont voici, résumé, la philosophie :

 

"Le revenu de base est un droit inaliénable, inconditionnel, cumulable avec d’autres revenus, distribué par une communauté politique à tous ses membres, de la naissance à la mort, sur base individuelle, sans contrôle des ressources ni exigence de contrepartie, dont le montant et le financement sont ajustés démocratiquement."

 

Cette approche est aujourd’hui prise en compte, voire mise en œuvre, à l’international : du Canada à la Finlande jusqu’en Suisse où un référendum doit avoir lieu sur le sujet en juin prochain. En France même, de timides voix se font entendre, notamment lors du récent débat parlementaire sur la République numérique.

 

Aujourd’hui le constat est patent autant que cruel : les dirigeants de nos sociétés prétendument développées n’imaginent pas les effets délétères – au secours les robots arrivent ! – de la révolution numérique en cours qui, inéluctablement va supprimer des emplois. Le nez sur les prochains chiffres du ministère du Travail, l’oreille à l’écoute du MEDEF, les politiques de droite et, hélas, pour beaucoup de gauche, se sont embarqués sur un Titanic dont ils se refusent à maîtriser le gouvernail. Attention, les icebergs ne sont pas bien loin.

 

Sylvain GOUZ

(09/02/2016)

 

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Sylvain GOUZ a créé et anime MEDIΔGOUZ, la structure qui abrite ses activités de journalisme et de conseil media...

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